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Dans les coulisses

2023-24 : les pertes ont été plus grandes chez RDS/RDS Info que chez TVA Sports

Le CRTC a dévoilé au cours des derniers jours les états des résultats de chacune des chaînes de télé canadiennes. Ces données sont disponibles à toute personne désirant les consulter.

Richard Dufour les a consultées, puis il a publié un très bon texte sur le sujet ce matin dans La Presse. Vous pouvez le consulter en cliquant ICI.

En gros, ce que le CRTC nous dit au niveau sportif, c’est que RDS (RDS/RDS2/RDS INFO) a perdu 22 millions $ lors de la dernière année de diffusion comptabilisée (1er septembre 2022 au 31 août 2023).

TVA Sports ? « Seulement » 18 millions $ !

Ça veut donc dire que nos chaînes spécialisées ont cumulé des pertes totales de 40 millions $ en 365 jours. Ouch !

Dire qu’il y a quelques années, RDS était la chaîne télé francophone la plus rentable au Québec et qu’en 2021, la chaîne était encore profitable…

« En 2016, RDS et RDS Info avaient généré à elles deux des profits totalisant 22,5 millions. » – Richard Dufour, La Presse

Rappelons que TVA Sports n’a jamais fait de bénéfices d’exploitation depuis sa création en 2012, elle, et que ses pertes totales sont désormais de près de 250 millions $.

Comment expliquer ces pertes massives ?

1. Toujours selon les chiffres officiels du CRTC, RDS a perdu 112 000 abonnés durant sa dernière année complète (7 %), alors que TVA Sports en a perdu 115 000 (9 %). Les gens sont nombreux à s’être désabonnés du câble au cours des dernières années, ce qui a bien évidemment fait mal aux chaînes spécialisées.

Résultat : les revenus ont chuté de 146 millions $ juste chez RDS et de 93,4 millions $ chez TVA Sports. Moins tu as de clients, moins tu fais rentrer d’argent (à moins bien sûr de hausser drastiquement tes prix, ce qui n’est pas arrivé.

Ça, ça ne tient même pas compte de RDS Info, endroit où les revenus ont le plus chuté en termes de pourcentages.

2. Richard Dufour explique dans son article avoir parlé à Pierre Boulanger, professeur au département des communications de l’Université d’Ottawa, et s’être fait dire que le Canadien était moins populaire qu’il y a 20 ans, ce qui nuisait aux revenus de chacune des deux chaînes en question. Le Canadien qui ne fait pas les séries – et l’absence de MLB, NBA et Nordiques -, ça fait mal au final.

M. Dufour a raison sur l’inquiétude qu’il doit y avoir suite à la chute d’abonnés, mais si les revenus de TVA Sports ont chuté de 3 %, malgré une perte d’abonnés de l’ordre de 9 %, c’est donc dire que la station a fait un excellent travail au niveau de la publicité. Les panneaux numériques, les publicités durant les entractes, les rectangles d’infographie dans la baie vitrée… tout ça a permis à TVA Sports de diminuer l’ampleur de la chute des recettes. Une chance !

Reste qu’il y a une limite au concept de multiplier les pubs… une limite qui a probablement été atteinte (et dépassée ?) la saison dernière.

3. Autant RDS que TVA Sports ont pris la décision de couper dans leurs dépenses respectives au cours des derniers mois et des dernières années. Plusieurs employés ont malheureusement perdu leur emploi parce que les décideurs ne pouvaient pas continuer de voir augmenter les dépenses quand les revenus ne suivent pas. Principe de base d’économie, malheureusement…

À moyen/long terme, ces coupures se ressentiront certes dans la qualité du produit livré en ondes. Quand tu passes de quatre à deux personnes pour décrire, analyser, animer et commenter un match de sport, ça finit par paraître à l’antenne.

4. Le système utilisé pour déterminer les auditoires est désuet. À l’ère du numérique, n’existe-t-il pas un meilleur moyen que celui des quelques centaines de pagettes pour échantillonner et estimer le comportement de plus de neuf millions de Québécois.es ?

De plus, une station va sur le marché de la publicité avec une estimation de l’auditoire qu’elle croit en mesure d’obtenir pour tel ou tel événement sportif futur. Si elle surestime le tout, elle devra compenser le client par la suite ; mais si elle sous-estime la popularité de l’événement en soi, elle laisse du cash sur la table. Ç’a pas d’allure !

5. Quelqu’un de très haut placé chez Québecor m’a fait savoir le mois dernier que si Bell (Télé) versait une redevance juste et équitable à TVA Sports pour chacun des abonnés de la chaîne qu’elle détient, TVA Sports serait presque profitable.

1,2 million d’abonnés à 1 $ de plus par mois, c’est 14,4 millions $ de plus à la fin de l’année. On n’est pas loin des 18 millions $ de pertes déclarées…

Ça va chauffer
À la fin de son article, Richard Dufour parle d’une guerre d’usure au cours de laquelle RDS pourrait au final avoir raison de TVA Sports.

Oui, les chaînes du groupe RDS ont cumulé des pertes annuelles de 22 millions $, mais puisque TSN a engendré 88 millions $ de profits nets avant impôts, c’est moins catastrophique que dans le cas de TVA Sports.

Sportsnet a déclaré sensiblement les mêmes profits, mais TVA Sports n’appartient pas à Rogers, contrairement à RDS et TSN (Bell).

Bref, Bell pourrait donc être tenté de miser gros avec les prochains droits nationaux francophones de la LNH – qui viendront à échéance dans un peu moins de deux ans – et ainsi pratiquement s’assurer d’éliminer TVA Sports du portrait médiatique québécois. Une fois TVA Sports disparu, Bell pourrait donc théoriquement mettre la main sur tout l’argent de pub placé en télé sportive au Québec.

Rappel : j’ai prédit le mois dernier un retour des droits nationaux francophones sur les ondes de RDS (dans un partenariat avec Rogers/Sportsnet et Amazon).

Mais chaque année qui passe est une année au cours de laquelle les géants numériques prennent davantage de place dans le portrait de la diffusion sportive. Autant en direct que dans le monde du documentaire…

Combien de temps est-ce que notre télé francophone sportive saura survivre ? 2 ans ? 10 ans ? 20 ans ? Qui vivra verra.

Prolongation

Rappel : le site de TVA Sports n’a plus de rédacteurs. On y publie désormais des chroniques écrites par des gens de l’Agence QMI.

– On m’a chuchoté au cours des derniers mois que RDS Info pourrait changer de mission ou tout simplement disparaître. RDS et RDS 2 viennent avec la même licence, alors que RDS Info a une licence différente, elle, soit celle de diffuser des nouvelles sportives. Pourrait-on voir la chaîne diffuser de plus en plus d’événements en direct ? De performances en reprise ? Ou tout simplement disparaître ?

– On m’a fait réaliser durant le weekend que la nouvelle de la semaine dernière, c’était beaucoup plus la fin d’une émission comme Hockey360 qui parlait, que le départ à la retraite de Marc Labrecque. Le fait de ne produire que deux émissions (5 à 7 et Le Hockey des Canadiens avec avant-match) coûtera beaucoup moins cher qu’en produire trois.

Le départ à la retraite de Marc Labrecque s’inscrit donc également dans la nouvelle tangente de couper les coûts de production…

– J’ai vraiment hâte de voir ce qui arrivera avec la diffusion des matchs des Alouettes (propriété de Pierre-Karl Péladeau sur Bell/RDS). Puisque l’entente est signée entre la LCF et Bell (TSN/RDS), je suis pas mal certain que ça va rester comme ça pendant plusieurs années encore.

Et selon ce qu’on me dit, PKP n’en est pas fâché du tout ; il a droit à une superbe couverture autant sur RDS que dans tout le réseau québecorien.

En rafale

– Ce n’état pas l’an dernier, l’année de transition ?

– Ce n’est pas la première fois que Laurent Courtois entend parler de rumeurs d’espionnage dans le monde du foot.

– Tom Pearce et Dawid Bugaj : Laurent Courtois a modifié son planning de départ.