Tesla a le vent dans les voiles ces temps-ci avec des résultats financiers très performants et un autre modèle, le « Y » qui sera bientôt livré aux premiers clients qui l’ont acheté. Quand Tesla annonce un nouveau modèle, il y a toujours un grand engouement pour voir s’ils vont nous présenter quelque chose d’originale. Et bien avec la future camionnette de Tesla, le Cybertruck, l’aspect « original » est coché.
Maintenant que la poussière est retombée suite au dévoilement du Cybertruck de Tesla au mois de novembre 2019 et que ce « coup de marketing » d’Elon Musk a été analysé de plusieurs points de vue, il y des vérités ainsi que des « Fake News » qui ont été véhiculés à propos de cette nouvelle camionnette toute électrique.
Je tiens à clarifier immédiatement que ni moi, ni mes collègues à Derrière le Volant sommes anti-électrique ou contre Tesla. D’ailleurs je trouve que nous traversons une des belles périodes, non seulement de l’automobile, mais de la mobilité en général, et que les prochaines années seront remplies de nouveautés intéressantes ainsi que de progrès technologiques qui auraient dû être mis en place depuis longtemps, hélas.
Ceci dit, Elon Musk a voulu frapper un gros coup avec ce véhicule angulaire qui, du point de vue esthétique, rompt avec le « look » traditionnel de la camionnette d’aujourd’hui. C’est correct de regarder vers le futur puisqu’il arrive à grand pas mais est-ce que Elon Musk est allé trop loin avec ce design ? Voici mes impressions.
Premièrement, décomposons les éléments d’une camionnette, le fameux « pick-up ». Ce n’est pas très compliqué, il y a 3 éléments majeurs; le compartiment moteur, l’habitacle et l’espace de chargement, donc 3 volumes. Le Cybertruck semble être quasiment un monovolume et, en ce sens, rompt avec la conception « traditionnelle » de ce genre de véhicule. Les camionnettes d’aujourd’hui sont devenus de vrais salons, toujours plus confortables et bien équipé avec des finis haut de gamme et toute la technologie, sinon plus encore, que ce qu’on retrouve dans les voitures et VUS du jour. Ce qui autrefois ne servait qu’à accomplir des travaux, sert maintenant aussi pour les loisirs et pour toute la famille, ceci étant particulièrement vrai au sud de notre frontière.
Le style »wedge »
En ce qui a trait au design, purement du point du vue esthétique du Cybertruck, je ne peux pas dire que je suis aussi impressionné que certains; le style « wedge », on pourrait dire dans ce cas « angulaire » ou même « cunéiforme » n’est pas du tout un nouveau langage expressif dans le monde de l’automobile. Les meilleurs exemples du style en forme de coin datent de la fin des années ’60 et le début des années ’70 avec l’Alfa Romeo Carabo de 1968, dessiné par nul autre que Marcello Gandini qui était à l’emploi de la firme Bertone à l’époque.
Ce qui est difficile à croire c’est que la Carabo de 1968 n’est apparue que seulement un an après l’Alfa Romeo Tipo 33 Stradale, tout en courbes, dessiné par Franco Scaglione, un autre grand designer qui a marqué son époque. D’ailleurs cette dernière est considérée comme un vrai chef d’?uvre dans le monde de l’automobile tout comme la Lamborghini Miura (1966-68) de Gandini.Le principe du profil en forme de coin a été utilisé pour éliminer les problèmes de portance aérodynamique à grande vitesse de la Lamborghini Miura, que Gandini avait conçu deux ans plus tôt. Cependant, sa réflexion innovante ne s’est pas arrêtée là: en plus d’avoir des phares cachés sous des volets actifs, le Carabo a été le premier concept-car avec des portes battantes à charnières avant, utilisé plus tard par Gandini lors de la conception de la Lamborghini Countach qui a depuis assumé cette technologie portière. En plus d’inspirer la marque révolutionnaire au sigle du taureau enragé, la Carabo a clairement donné des indices de style au concept-car Lancia Stratos Zero, qui à son tour a inspiré l’emblématique Stratos HF. Ce ne sont donc pas les exemples qui manquent pour tracer l’histoire de ce type de forme automobile. On peut dès lors dire que c’est loin d’être un exercice de style « originale » ou « unique » pour le Cybertruck de Tesla si on considère qu’il y a de ça 50 ans, ces formes De plus, il y a de sérieuses questions au niveau de la sécurité pour ce véhicule. Voici une autre raison pour laquelle le Cybertruck peut sembler étrange : il ne semble pas qu’il possède tous les éléments nécessaires pour qu’il soit prêt, et homologué, pour la route. Le modèle présenté au public au Salon de Los Angeles en novembre 2019 ne disposait pas de rétroviseurs latéraux, ce qui est obligatoire aux États-Unis (bien que le gouvernement fédéral envisage de modifier la règle). Ses phares, une fine bande d’éclairage, ne seraient pas légaux dans la rue. Les experts en ingénierie automobile se disent également préoccupés par l’absence d’une «zone de déformation» visible, conçue pour s’effondrer et absorber le plus gros de l’impact lors d’une collision frontale. Non seulement, mais le matériau du corps, « l’exosquelette » du Cybertruck a également soulevé des soucis. L’ANCAP (Australasian New Car Assessment Program), l’équivalent de la IIHS américaine, requiert que les véhicules doivent absorber une partie de l’énergie lors d’un impact car, si ce n’est pas le cas, ce sont les passagers qui en subiront les conséquences. De toute évidence, le Cybertruck n’aurait pas pu entrer en production sous sa forme actuelle. Il manque les essuie-glaces et cette camionnette manque également de clignotants. Le défi sera de transformer ce design trapézoïdal en quelque chose approuvé pour la vente sur les marchés du monde entier, tout en gardant son style Quelques jours après le lancement du Cybertruck, on a eu droit à un « tir à la corde » entre celui-ci et un Ford F-150 dont vous pouvez visionner la vidéo ici : https://youtu.be/jzKCJsou10w (La vidéo est an anglais et est très bien vulgarisée par un jeune qui maîtrise aussi bien la physique, les mathématiques et la communication.) Dans cette vidéo, le type explique, via une vulgarisation de la physique, ce qui est à l’?uvre entre ces deux véhicules mais le fait le plus remarquable est que le F-150 ne fonctionne pas avec les quatre roues motrices. On y voit clairement les roues avant du F-150 qui ne tournent pas contre la direction du Cybertruck mais bien dans le même sens, ce qui indique clairement que le rouage avant n’est pas enclenché. Ce n’est qu’un des aspects qui font en sorte que ce face-à-face est une démonstration bidon. Honnêtement, je suis très étonné que quelqu’un comme Elon Musk et sa compagnie Tesla pensaient que personne ne se rendrait compte de ce duel complètement truqué et donc faux. Tesla est déjà la référence en matière de véhicules électriques; pourquoi vouloir en faire autant quand ce n’est pas nécessaire. Et attendez de voir une vraie comparaison entre « pommes et pommes » quand le F-150 électrifié sortira. Là, on pourra jaser? Un autre aspect important pour tout véhicule électrique, et c’est un défi immense, c’est le poids du véhicule. On le sait très bien, plus c’est pesant, plus ça prend d’énergie pour le faire déplacer. Déjà que le/les blocs batteries sont très lourds, si en plus on y ajoute une carapace en acier inoxydable indéformable de 3mm d’épaisseur et des vitres anti-balles (ce que clame M. Musk), ça ne fait pas de sens et ça devient en quelque sorte l’antithèse de ce pourquoi on travail si fort : sauver de l’énergie ou du moins en consommer la moins possible! Et ne venait pas me dire que le Cybertruck a une capacité de remorquage BEAUCOUP PLUS GRANDE que le F-150. On parle de 14 000 Lbs. pour le Cybertruck versus 13 000 Lbs. pour le F-150. La différence n’est que d’à peine 8% de plus. Si ça avait été dans le pourcentage à double chiffre, disons 20%, alors là on aurait pu dire que c’est « significatif » mais en bas de 10%, je ne peux pas dire que je suis si impressionné. D’ailleurs, le Cybertruck sera classé dans la même catégorie que le Ford F-250 (Classe 2B-3, Medium-Duty) selon les dernières données et a une capacité de remorquage de 13 000 Lbs. Par contre, si on prend le Ford F-250 Super-Duty, on parle d’une capacité de remorquage de 20 000Lbs., ce qui veut dire que la camionnette d’Elon aurait un manque à gagner de 6000 Lbs! Il faudra donc que ces comparaisons soient plus justes sinon ça devient de la désinformation, autant d’un côté comme de l’autre. Pour revenir au design extérieur, on est habitué de voir des voitures qui semblent profilées par le vent et qui ont des formes organiques et courbes, à différents degrés. Il est bien évident que dès qu’on déroge aux canons d’esthétique du jour, on étonne, on prend par surprise et, comme M. Musk l’a fait en dévoilant ce Cybertruck, on a tous pris un pas de recul, sourcillant aux premières images de cette version de la camionnette moderne.