(chronique)
J’ai subi de la violence avant et après ma séparation. J’ai été diagnostiquée avec un syndrome de choc post-traumatique. Ça fait qu’à chaque fois que je dois voir mon ex, disons pour un échange d’enfants, ou lui écrire, disons pour une histoire de journée pédagogique, ça me prend tout mon courage. J’en shake avant et après. Chaque fois, plein de souvenirs douloureux remontent. C’est ça, un syndrome de choc post-traumatique: c’est comme après avoir vécu la guerre, sauf que mon Irak, c’est mon ex, et quand je le vois, c’est comme si des bombes tombaient sur ma maison. Tout mon corps pense que je vais mourir. Mon instinct de survie se met à high et me hurle d’aller me cacher dans un bunker. Ça me prend la journée au complet et parfois plus longtemps pour redescendre.
Quand je sais que je vais être exposée à mon trigger, je me prépare le mieux possible. Je m’entoure. Je médite. Je monte mes barrières émotionnelles. J’utilise toutes les stratégies que je connais. Je prends soin de mon sommeil la veille, parce que si j’ai fait de l’insomnie en plus, je suis encore plus fragile. J’annule mes rendez-vous, parce que je sais qu’après, tout ce que je vais vouloir faire, c’est prendre une douche et me rouler en boule dans mon lit.
Mais là, c’est la fête des Pères qui s’en vient. Avec partout les annonces de cadeaux idéaux pour papa, les textes d’ode à la paternité que j’aurais tant voulu pouvoir écrire sur le père de mes enfants, les bricolages de l’école et de la garderie qui lui sont destinés, etc. Il fut un temps où j’imaginais que si je me séparais, je lui offrirais toujours un petit cadeau à cette occasion, et qu’il ferait de même à la fête des Mères. C’était ma séparation rêvée. Mais là, les annonces et les articles me plongent chaque fois dans une sensation de panique que je n’ai pas vue venir, à laquelle je n’ai pas pu me préparer, comme si ça m’attaquait de partout. Bang! Fête des Pères ici et Paf! Fête des Pères là. Mon cerveau fait l’équation fête des Pères = mon ex = danger. Danger!!! Toutes les lumières rouges allument. C’est vraiment épuisant.
J’aurais voulu écrire des éloges aux papas formidables que je connais: il y en a plein, des papas sortis d’une cuvée de diamant brut qui me redonnent espoir en la paternité et la masculinité. La prochaine génération est entre de bonnes mains. Mais là, j’ai surtout envie d’envoyer plein d’empathie à toutes les mères pour qui cette période est un dur rappel que pour différentes raisons et malgré les incitatifs publicitaires, elles n’ont pas pantoute envie d’écrire une carte ni d’acheter la nouvelle gogosse « parfaite pour papa » du Canadian Tire. Si vous en connaissez une, c’est peut-être le temps de lui envoyer du love.
Moi j’ai surtout envie de me trouver une grotte pour aller y dormir jusqu’à ce que la fête des Pères soit passée.