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Le Mans 1955 : Le plus grave accident en course automobile

On était le 11 juin 1955 et la course des 24 Heures du Mans battait son plein au Circuit de la Sarthe. L’horloge indiquait 18 h 26. On en était au 35e tour de la course. Lance Macklin se faisait dépasser pour la deuxième fois au volant de son Austin-Healey par le légendaire Mike Hawthorn pilotant une Jaguar. Hawthorn menait alors l’épreuve.

La deuxième position était détenue par Juan Manuel Fangio, l’actuel champion de Formule Un de l’époque, qui se rapprochait d’Hawthorn.

Hawthorn venait de recevoir, par panneau (à l’époque), l’ordre de passer aux puits à la fin de ce tour. Il dépassa la Mercedes de Pierre Levegh (de son vrai nom Pierre Bouillin) qui roulait alors en sixième position approchant trop près de l’Austin-Healey de Macklin. Ce dernier, voyant que les autos plus rapides venaient à lui, décida de changer de voie vers celle de droite pour leur laisser le chemin libre. Hawthorn en profita pour dépasser Macklin, mais rabattit très (trop?) rapidement devant lui pour entrer aux puits. Il n’y avait pas de ligne de décélération à cette époque.

Macklin freina alors brusquement. Ironiquement, son Austin-Healey était équipée, comme les Jaguar, de freins à disque, une nouvelle technologie à cette époque-là. Selon Macklin, les roues avant bloquèrent ce qui envoya son Austin-Healey à la gauche. Cette manoeuvre s’est produite là où la piste rapetissait et tournait vers la droite pour les puits. Levegh tournait donc vers la droite avec Fangio derrière lui. Sa Mercedes roulait à environ 130 m/h (210 km/h) et la roue avant droite de la 300 SLR toucha celle de la gauche arrière de l’Austin-Healey ce qui catapulta la Mercedes dans les airs.

L’auto atterrit alors sur le terre-plein d’un mètre de haut qui séparait la piste des spectateurs.

La voiture fut désintégrée à l’impact et Levegh en fut éjecté. Le moteur, le radiateur et la portion avant droite du train avant se détachèrent et foncèrent tout droit sur les spectateurs. La voiture de Macklin termina sa course à quelques mètres des puits des Mercedes et des Cunningham et frappa un policier, deux officiels et un photographe. Ils furent gravement blessés, mais ils survécurent. De l’autre côté de la piste, l’histoire était toute autre.

Une fois la poussière retombée et le véritable décompte des victimes fait, quelque 84 spectateurs (ce chiffre peut varier selon les reportages) furent tués et 178 blessés. Toutes les personnes décédées, sauf trois, étaient de nationalité française. Levegh fut tué sur le coup.

Ironiquement, la course continua. Il faudra attendre six autres heures avant que les administrateurs de Mercedes déclarent forfait et retirent leurs bolides de l’épreuve (une décision qui dura des années). Mais pas Jaguar. Et ce fut Hawthorn qui gagna les 24 Heures… sans jamais admettre qu’il aurait pu être blâmé pour l’accident. Dans son autobiographie «Challenge Me The Race», Hawthorn rejetait le blâme sur Macklin. Celui-ci voulut le traîner en cour pour diffamation… mais Hawthorn périt dans un accident de la route en 1959.

À la fin, personne ne fut déclaré responsable du pire accident jamais en course automobile. La France voulut bannir les compétitions automobiles jusqu’à ce que les spectateurs furent mieux protégés. La Suisse, elle, a banni les courses, un point c’est tout. Et c’est pareil aujourd’hui. Ce qui fut le pire, c’est le manque d’attention que les blessés ont eus. Il faut dire que cet incident s’est déroulé une dizaine d’années après la Deuxième Grande Guerre et beaucoup de gens étaient demeurés insensibles à de telles horreurs ayant vu pires pendant le Conflit.

Aujourd’hui, une telle catastrophe ne devrait pas se répéter. Les dispositions de sécurité pour les spectateurs sont nettement plus avancées (en passant, heureusement que les grillages de protection ont retenu Bobby Allison et sa Buick en course NASCAR à Talladega en 1988 sinon cette auto dont le pneu arrière venait d’éclater devant les gradins à près de 200 m/h [300 km/h] allait terminer sa course dans la foule.

L’auto s’était présentée de côté à cette vitesse et s’envola comme un petit avion). Et les voitures de course ont, elles-mêmes, moins de matériaux pouvant prendre feu, comme ce fut le cas de la Mercedes de Levegh en 1955.

Néanmoins, la mort demeure une possibilité en course automobile, même aujourd’hui. Mais plus jamais comme au Mans en 1955, espérons-le…