(AFP) – Les alcooliques souffrent souvent de troubles de la mémoire qui compliquent singulièrement leur prise en charge, mais sont pour la plupart réversibles après abstinence, ont indiqué des spécialistes à Paris.
« Les atteintes sont très variables », a dit Hélène Beaunieux, une chercheuse en neuropsychologie lors d’une rencontre-débat organisée par l’Inserm avec les associations d’entraide aux personnes en difficulté avec l’alcool.
Selon Mme Beaunieux, qui travaille sur l’impact de l’alcoolisme sur la mémoire depuis plusieurs années à l’Université de Caen, la prise en charge hospitalière n’est pas adaptée pour les troubles cognitifs.
« On demande actuellement aux malades d’oublier leurs habitudes et de mettre en place d’autres automatismes en l’espace de 15 jours, ce qui est juste impossible du point de vue cognitif », souligne-t-elle.
L’alcool peut en effet avoir des effets sur la mémoire à court terme, qui permet de stocker et de manipuler les informations pendant quelques minutes, mais aussi sur la mémoire épisodique, qui permet de se rappeler des évènements vécus dans un contexte précis.
Il agit également sur « la métamémoire », qui permet de connaître et de contrôler le fonctionnement de sa mémoire et de s’auto-évaluer, une fonction souvent perturbée chez les alcooliques, qui ont tendance à « se surestimer », selon la chercheuse.
Lorsque la mémoire épisodique est déficitaire, par exemple, les patients arrivent à l’hôpital alors qu’ils « n’ont pas encore pris conscience de leur problème », explique la chercheuse.
Mais bonne nouvelle, cette perte de mémoire est généralement réversible chez les patients abstinents, à l’exception de ceux atteints du syndrome de Korsakoff, la forme la plus sévère de l’alcoolo-dépendance.
« Une amélioration significative » des capacités cognitives a ainsi été observée chez 14 patients revus six mois après le début de leur abstinence, alors qu’une dégradation des fonctions exécutives (permettant un comportement flexible et adapté au contexte) était observée chez les 20 patients qui avaient rechuté.
Mme Beaunieux préconise une stratégie prévoyant une évaluation de la mémoire chez tous les patients après le sevrage et un allongement ou une adaptation de la prise en charge pour ceux ayant des troubles cognitifs.